Tant de discussions à 14 ans, 20, 40 ou 50 et plus. Tant de littérature. Ces 8 mots notamment des Grecs de l’antiquité pour mieux décrypter l’Amour en ce jour de Saint Valentin, symbole du romantisme inscrit en nous par les contes, les livres, les films… L’amour romantique. Une quête. Et si difficile à entretenir sur la durée.
Derrière ce mot « aimer », il y a tant de nuances et de besoins différents. Mettre en conscience ces besoins. Identifier ce qui se joue. Pourquoi ?
Pour être moins déçu.e ; moins dans l’attente d’un impossible. Sortir du fantasme de l’unique qui remplira tous mes besoins d’amour si multiples.
Pour réfléchir après cette journée dédiée à l’amour du couple, pour prendre du recul sur une relation ou son absence et potentiellement construire un futur avec encore plus d’amour.s.
L’amour amoureux, on passe sa vie à l’expérimenter. A chaque âge ses apprentissages. A cinquante, je trouve ce sujet passionnant. Sagesse d’amour est-ce possible à acquérir… ? Ou justement, ne jamais l’acquérir car ce serait la fin de l’amour ? Que de questions depuis la nuit des temps.
Ces 8 nuances d’amour m’ont éclairée il y a 10 ans. Trois clients m’ont inspirée cet article et ma relation actuelle me questionne… Alors je décide d’écrire ma propre vision qui n’engage que moi sur ces 8 mots grecs.
Préambule : L’homme est un animal « de lien », qui se nourrit des interactions multiples avec ses semblables dans un sens « je t’aime » et dans l’autre, « je suis aimé.e ». C’est vital. Nous mettons tant d’énergie dans la recherche du partenaire amoureux pour le trouver …
Cette journée symboliquement est celle où je te mets, toi, au-dessus de tout, où je te célèbre toi, et en même temps je me célèbre dans le regard d’amour que tu portes sur moi. Amour, amour toujours, on y croit … serment d’éternité. Et puis la réalité ensuite. Les différends… normaux puisque nous sommes différents et en évolution perpétuelle.
Complexité de ce sentiment. Complexité des besoins qu’on attend que l’autre remplisse. Qui peuvent être dispensés dans le couple mais aussi à l’extérieur. Tous ou que certains ? Que de questions ? Comment faire ? Comprendre d’abord et ensuite, chacun fait comme bon lui semble.
# 1 Eros : l’amour physique, sexuel.
Le plus « chaud ». Celui qui parfois nous dépasse. Qu’on ne semble pas pouvoir choisir. Le physique. Courbes, cheveux, odeurs, phéromones… ? Les sens qui sont aiguisés. C’est le corps qui est à l’œuvre. La partie animale en nous prend le dessus. Elle gère et parfois on a du mal à comprendre. Mais c’était là. C’était bien. Cela existe.
Un des besoins physiologiques de base dans la pyramide de Maslow. Pour l’homme comme pour la femme. Se réconcilier avec Eros est la base d’une sexualité épanouie. Pas facile puisque cela fait des siècles qu’il a été honni et que des rôles caricaturaux ont été distribués. Heureusement, cela bouge en ce 21ème siècle. Plus il sera accepté, plus il sera équilibré.
Avec Eros, c’est le désir qui a pris les rennes. Ce désir qui se nourrit de la distance entre deux êtres. Amour intense, passionné qui est celui d’une intimité partagée, d’une mise à nu du corps. Si important dans l’amour romantique. Il peut s’épuiser s’il n’est pas enrichi par d’autres formes d‘amour.
Il est plaisir égoïste et peut être vécu plus ou moins en communion avec l’autre, plus ou moins dans le partage, dans le « donner et recevoir » et non dans le « prendre ». Une mise à nu des « âmes », des êtres profonds à travers celle du corps. Eros équilibré devient spirituel d’après le tantra.
#2 Philia : l’amour amitié.
On partage, on se comprend ou on essaie, par l’écoute. On est en communion d’esprit. L’autre est écho de ce que je vis, il m’écoute, il m’éclaire par son point de vue similaire ou différent, me soutient parfois… Enrichit ma vision. Pas de jugement.
Je lui dis toute ma pensée. Je suis en confiance. Je me livre comme il se livre. On se sent égaux. Ici, c’est une mise à nu des esprits, un partage des doutes, de la vulnérabilité d’être au monde.
C’est cet.te ami.e qui ne nous attire pas physiquement. La « friend zone » qui parfois gène l’un des amis qui a, lui, Eros en plus. Parfois cela bascule… Parfois il faut éclaircir les choses et l’amitié ne peut plus être la même. Parfois c’est une évidence pour chacun. Rien d’autre que Philia. L’amitié avec l’autre sexe ouvre sur le monde de l’autre sexe, sans risque. Parfois de vieux amants restent amis aussi…ou le deviennent vraiment.
Car on attend de son amant.e d’être aussi son ami.e. Peut-il l’être complètement ? Grande question ! Peut-être que oui et peut-être que non. Une part de nos pensées ne pouvant parfois pas se partager avec sa moitié !
L’autre parfois ne sait pas encore bien faire « Philia » quand il y a Eros en jeu. C’est le sujet de beaucoup de disputes. Parfois des jeux de pouvoir sont là. Parfois l’autre est moyennement capable d’écoute, de communication, de soutien en ce moment ou n’a jamais appris. Les conflits ont parfois cassé cette capacité aussi.
Si les deux le souhaitent, chacun peut apprendre ou ré-apprendre à mieux écouter, à communiquer, à accueillir l’autre. Alors, sur la durée d’un couple, une complicité profonde se développe, un lien d’esprit à esprit, pour une relation encore plus riche. Chacun aspire je crois à trouver dans son couple ce lien de partage riche, où l’on peut « être soi » totalement.
Si ce n’est pas là, avoir des ami.e.s pour se nourrir de ce lien unique sera essentiel. Et même si cela marche dans le couple, les amis complètent et enrichissent. Ne pas prendre le temps de développer des relations amicales intimes peut manquer ensuite face à l’adversité… Car alors, un ami « Philia » : celui à qui on peut tout confier, est très précieux.
#3 Ludus : l’«amour jeu »
C’est un peu notre part enfant qui aime : spontané, espiègle et curieux qui aime jouer et s’amuser. Qui aime danser, faire la fête. Qui se met en joie en voyant l’autre. Il est là entre amis quand on fait la fête, on danse, on se séduit par ce qu’on est profondément et spontanément.
Dans le couple, c’est la séduction. Le début d’une relation est riche de Ludus. Quand rien n’est décidé, rien n’est encore sûr. Tout est possible et on ne sait pas quoi exactement. C’est délicieux. Parfois ce jeu manque quand on est en couple depuis longtemps. On a oublié de continuer à se séduire mutuellement.
Comment remettre cette joie à découvrir l’autre et à se laisser découvrir… à séduire et se laisser séduire. Par exemple, ne pas croire que l’on sait tout de l’autre. Car il change, il ne sait pas lui-même parfois ce qu’il est. Les cases dans lesquelles on enferme l’autre (ou s’enferme soi-même) et habitudes tuent « Ludus ». Remettre alors de l’imprévu, de la spontanéité, de la séduction, du jeu.
#4 Storgê : C’est l’affection qui vient de souvenirs partagés.
C’est celui qui se crée avec le temps passé ensemble. Celui des amis d’enfance, d’adolescence. Celui qu’on a pour sa famille, ceux avec qui on a partagé des tranches de vie au boulot ou perso.
Parfois il est mal en point dans les familles on ne se sentait pas écouté, pas soutenu comme on aurait pu l’attendre. Un parent n’était jamais là par exemple ou peu disponible. L’intimité du quotidien partagé peut ne pas s’être créée. Cet amour vient du temps de qualité passé ensemble.
Dans le couple, Il se crée peu à peu à mesure que l’on « fait des choses ensemble ». Il renforce les autres amours. A ne pas sacrifier à l’autel du travail ou des enfants qui menacent cet amour souvent car on ne prend plus le temps d’être à deux de manière sympa. Cette complicité du vécu et des émotions partagées crée un socle commun. Encore faut-il qu’il soit agréable.
Les projets construisent aussi cet amour futur. Ils disent à l’autre qu’on se projette avec lui donc que la relation a un futur. On dit que le couple se nourrit de projets communs.
D’où la nécessité d’avoir au moins quelques activités et valeurs compatibles pour construire Storgê. Les crises arrivent parfois quand les enfants quittent le nid, quand la retraite arrive, car va-t-on réussir à trouver encore des projets communs ? A passer de bons moments ensemble ? Ceux du passé peuvent ne plus suffire.
#5 Philautia ou l’amour de soi.
L’amour de soi constitue les fondations de l’estime de soi. Il se développe plus ou moins bien dans l’enfance, l’adolescence et la vie d’adulte en fonction du regard des personnes d’autorité ou de nos pairs sur nous. On a intériorisé les jugements de l’extérieur à une époque.
Quand on est différent de la « norme » du moment, on peut ne pas aimer certains traits chez soi. Ces traits qu’on n’aime pas, qu’on juge, on les appelle les parts d’ombre. On en sera esclave en fait malgré soi. Apprendre à les aimer permet de s’apaiser et de s’en libérer. Avoir une forme de « compassion » pour ses « défauts » : un amour-acceptation- bienveillant.
Dans le couple, parfois on s’attend à ce que l’autre nous aime plus que nous nous aimons. Or l’autre ne peut pas remplir ce vide d’amour de soi. Même si on peut le croire au début d’une relation.
Une bonne estime de soi permettra des relations plus équilibrées. Evitera de faire trop de concessions pour être aimé, de s’oublier dans la relation. Ce qu’un jour on reprocherait à l’autre ou qui nous rendra malade.
Oublier de s’aimer pour garder l’amour de l’autre ne mène pas au bonheur durablement semble-t-il … Une bonne dose de Philautia est donc utile. C’est un peu d’égoïsme, nécessaire pour être altruiste sur la durée. Trop de personnes ne s’aiment pas assez pour bien s’occuper d’elles-mêmes. Souvent les femmes s’oublient dans le lot d’une journée bien remplie… Réhabilitons Philautia (et un peu l’égoïsme, honni lui aussi car trop effectivement nuit) et n’attendons pas que autrui nous donne tout ce dont on a besoin.
#6 Mania : l’amour obsessionnel
C’est l’amour passionnel, fort, et qu’on imagine « full » ; l’objet de nombreux films. On a envie de vivre cet appel intense pour l’autre. Les films ne finissent pas toujours bien.
On cherche dans cet amour à confirmer sa propre valeur, à être aimé complètement. Dans une version saine, il peut réparer le manque d’amour de soi dont on peut souffrir. Si c’est exacerbé ou que l’autre n’a pas ce besoin, il y aura déséquilibre. Il peut y avoir une dépendance. C’est ce qui explique que certains restent dans une relation violente ou qui fait souffrir car il y a des moments très forts qui paraissent indispensables pour vivre.
Le manque d’estime de soi en est la cause. Parfois il est renforcé par un Ludus exacerbé, une séduction faite pour plaire et se prouver sa propre valeur par le désir de l’autre pour soi. Je m’aime à travers ce désir que l’autre éprouve pour moi. Il me renvoie une belle image de moi que je n’ai pas moi-même. J’en ai presque besoin pour survivre.
En développant l’estime de soi et l’amour de soi, Philautia on pourra faire évoluer la relation.
Si chacun dans le couple développe son estime et n’attend plus de l’autre de l’aimer plus que lui-même, la relation peut aller vers l’amour durable, Pragma ci-après. Si cela ne réussit pas, avoir amélioré son estime de soi permet d’aborder la relation suivante différemment. On ne rencontrera plus le même type de personnes non plus. Ce sont nos inconscients qui nous mènent vers ce dont ils ont besoin…
#7 Pragma : l’amour durable construit
C’est celui qu’un couple construit peu à peu dans le temps s’il dépasse les conflits et réussit à conserver le lien. Cela est possible mais pas toujours.
Tout couple aura ses crises. Réussir à les traverser, cela demande de la communication, une acceptation de l’autre, de la patience. On dit que le couple et l’amour peut être le creuset de notre évolution. Les deux doivent être prêts à faire le travail nécessaire. Si un seul le fait, le couple risque la séparation car le pacte amoureux inconscient du début ne sera plus jouable ; l’un des deux ayant évolué sur ses besoins inconscients. Et parfois, il y a un mieux pour chacun à se séparer et une autre relation qui permettra d’apprendre d’autres choses.
Le chemin amoureux avec ses expériences diverses, si on en tire les apprentissages, permet d’être de plus en plus « prêt » peut-être pour pouvoir vivre ce pragma dans une relation un jour.
Ceux qui réussissent ont l’air si beaux : ces couples qui ont atteint les noces de diamant. On rêve tous de cela. Plus encore quand on a eu des parents séparés ou conflictuels. C’est peut-être pour cela que des jeunes couples consultent plus que les anciens d’ailleurs…
#8 Agapé : l’amour inconditionnel, désintéressé.
Cet amour est celui vers lequel on peut tous aller peu à peu. Celui qui accepte ce qui est, en soi et chez les autres. On parle d’ouverture du cœur parfois. Celui qui accueille, bienveillant. Qui soutient et challenge pour le bien de l’autre. Qui cherche à satisfaire l’autre plus que soi-même. Tendre, sensible, attentionné. Vouloir le bien de l’autre, c’est une belle définition de l’amour désintéressé. Celui qu’on a pour un animal, ou bien sûr celui qu’on ressent pour ses enfants.
Parfois pour ses amis. Et pour son amant.e ? Tout le monde attend celui-là dans le couple. En avoir est magnifique. L’autre en a-t-il aussi ? Equilibre donc à trouver entre le bien de l’autre et le bien pour soi peut-être ? Si un seul a cet amour, un déséquilbre se crée. Se sacrifier pour l’autre, à terme, on va finir par lui reprocher sauf si cela a été discuté et est fait en conscience. Important de ne pas oublier l’amour pour soi dans le « deal » du couple.
Trop de couples éclatent du jour au lendemain car un des deux a donné cet amour sans le recevoir, souvent inconsciemment d’ailleurs trop longtemps.
La question finale : quel cocktail existe dans mon couple ? dans cette relation ? dans ma vie ? Et comment les nourrir au quotidien ? L’occasion d’optimiser le futur 😉
Enjoy loving … toute l’année !
merci aux clients de cette semaine qui m’ont inspirée…